Voiture d’exception : Williams FW18

9 10 2012

Depuis la seconde partie des années 90, seules quelques F1 ont pu prétendre au titre de ‘meilleur bolide de tous les temps’. La Ferrari F2002, voiture de tous les records en 2002-03, ainsi que la radicale Red Bull RB7 de 2011 font partie de cette élite. Mais la meilleure, d’un point de vue statistique et esthétique, est sans conteste la superbe Williams de 1996, la FW18.


Le futur champion du monde Damon Hill et son fougueux successeur d’équipier Jacques Villeneuve l’ont ainsi conduite à 12 victoires, 12 poles, 11 meilleurs tours, 21 podiums ainsi que 25 premières lignes, sur un total de 16 courses. Ceci équivaut à 72,5% de réussite, légèrement au-dessus de la Red Bull RB7 (70%) et de la Ferrari F2002 (69,5%).

Cette domination fut bâtie sur de solides fondations : mis à part le rehaussement des flancs des cockpits, la FIA avait décidé de ne pas changer outre mesure la réglementation technique pour 1996. De fait,  le duo de choc en charge du design chez Williams, composé d’Adrian Newey et de Patrick Head, avait opté pour une simple évolution plutôt que pour une rupture complète.

Bien avant Red Bull, Newey avait déjà fait des merveilles chez Williams, mais aussi Leyton House, McLaren… Ici avec Patrick Head.

A l’époque, il leur avait été reproché d’avoir été trop conservateurs mais, étant donné que la FW17 (version B), avait terminé l’année en trombe, leur philosophie fut guidée autant par la recherche de la performance que par le pragmatisme.
La boite de vitesses transversale de la FW17B fut conservée et améliorée sur la 18, à contre-courant des boites longitudinales de Benetton et McLaren. Cette option procura à Newey davantage de marge de manœuvre pour entreprendre des changements drastiques sur le diffuseur. Newey dessina aussi un nez haut perché pour la FW18 – un design aéro plus efficace, devenu depuis l’une de ses marques de fabrique. Patrick Head, pendant ce temps, planchait sur la suspension. “L’aspect le plus crucial réside dans l’intégration du facteur aérodynamique et du système de suspension”, expliquait Newey à l’époque. “Inutile d’avoir des tonnes d’appuis si les suspensions ne sont pas capables de les supporter. De même, ce n’est pas bon d’avoir une super géométrie de suspensions si la voiture ne produit pas assez d’appuis”.
La combinaison de tous ces éléments produisit une voiture ultra-maniable générant bien plus d’appuis que l’ensemble des monoplaces conçues dans les autres usines. Ce fut flagrant lors de la deuxième manche de la saison, à Interlagos au Brésil, où Damon Hill se qualifia une seconde plus vite que son premier adversaire (hors Williams).
C’était appréciable de courir sur une si bonne auto”, se rappelle Hill. “L’équilibre est important car ça vous donne plus de libertés, mais si une voiture est nerveuse, il est difficile de se sentir en confiance. La FW18 était vraiment une voiture bien équilibrée et ce fut la seule auto dans toute ma carrière où je me suis vraiment senti à l’aise dedans. Adrian avait fait un effort spécial sur le confort, ce qui était très sympa de sa part ! J’aurais vraiment pu m’assoir dedans, dormir et m’y sentir plus détendu que dans mon propre lit”.

Le V10 Renault RS8 à 67° fut un atout indéniable pour Williams en 1996.

La cavalerie était délivrée par le V10 Renault à 67°, qui alliait puissance et fiabilité à une époque où les moteurs cassaient encore souvent. “Elle était maniable, véloce, et le package était bon”, se souvient Hill. “Renault avait beaucoup travaillé avec Williams sur la répartition des masses, ainsi que sur l’allégement du moteur”.
Le motoriste français prêta aussi main forte à l’équipe pour réviser l’installation hydraulique, dans une tentative d’éviter tous les problèmes techniques qui avaient compromis la saison de Hill en 1995. Mais la Williams n’excellait pas que sous la carrosserie. Le bon vieil adage de la F1 : ‘Belle donc rapide’ n’avait jamais été aussi vrai qu’avec la FW18.
Elle était magnifique car minimaliste”, déclare Hill avec un sourire. “Elle avait une boite semi-automatique mais n’était pas trop sophistiquée et ne causait pas de pépins. Elle était épurée et il est toujours agréable de la voir évoluer en piste. Pour moi, cette auto est une référence en F1”.
Sans surprise, la lutte pour le titre se résuma bien vite à un duel entre les deux coéquipiers Hill et Villeneuve : “C’était une période où il n’était pas rare qu’une équipe détienne un avantage technique et qu’elle ait quasiment course gagnée avant même le début des hostilités”, se remémore Hill. “Vous pourriez dire que c’était ennuyant, et vous auriez sans doute raison, mais du point de vue du pilote, c’était une véritable chance d’avoir une voiture compétitive et on voulait en tirer le maximum. C’est bien plus facile lorsque vous avez une voiture supérieure”.

Damon Hill éprouva des difficultés pour se défaire de son néophyte d’équipier Jacques Villeneuve et remporter le titre.

La FW18 était diablement rapide, sacrément belle, et possédait la fiabilité nécessaire pour remporter les deux titres haut la main. Que demander de plus ?

F1 Racing n°165, Octobre 2012